Paris, 9 juillet 1963
Le théâtre Récamier accueille une performance du dramaturge américain Ken Dewey, mise en musique par le compositeur minimaliste Terry Riley à l’aide d’une machine imaginée pour l’occasion par un technicien de l’ORTF dont l’histoire n’a pas retenu le nom. Cette machine, le Time Lag Accumulator, inaugure une nouvelle technique de composition en temps réel, le live looping, devenu cinquante ans plus tard une composante majeure de la redistribution des cartes entre musiques électroniques et électroacoustiques.
Paris, 19>21 juillet 2013
Après Londres et Norwich, avant Cologne, Berlin, Seattle, Portland et la Californie, le Paris Loop Jubilee réunit vingt des musiciens français et internationaux les plus originaux en la matière, qu’ils viennent du jazz, du rock, du classique, du beatboxing, de l’expérimental ou de l’électro, pour trois jours de concerts et de démos dans un esprit de rétroaction, de découverte et de partage des techniques.
Paris Loop Jubilee
International live looping festival
du 19 au 21 juillet 2013
Les Voûtes
19 rue des Frigos 75013 Paris
8€ la journée / 15€ le pass festival
ORGANISATION : Compagnie laBase (Châtellerault - 86 -)
Emmanuel Reveneau 06 68 29 05 03 / email
« Pour l'origine de delsampler, je dois retourner aux années 1970 et à mon intérêt pour la musique de Terry Riley et de Fripp et Eno et ma fascination pour l’écho. En dehors de l'aspect musical, je me suis vite inquiété de savoir comment de telles musiques étaient réalisées.
Voir Robert Fripp en solo en 1979 à été vraiment le point de départ de mes premières tentatives. J'ai donc essayé de reproduire le dispositif de bouclage à deux magnétophones des frippertronics avec deux magnétos à bandes, un Teac et un Revox. La dissymétrie du dispositif rendait le procédé aléatoire, dans un sens la bande finissait par avoir trop de tension et parfois se brisait, dans l'autre elle se détendait et le pleurage finissait par gagner mais il y avait bien 5/10 minutes de fun avant l'événement fatal.
Un réglage fin de la vitesse des magnétos aurait réglé le problème, mais je ne savais pas faire.
J'ai bricolé comme ça plusieurs années, n'ayant jamais eu assez d'argent pour acheter le deuxième Revox (…).
Dans les années 1980, j'ai bricolé un peu avec un delay numérique, mais avec une seconde de décalage max on était loin du compte (pour avoir plus il fallait faire un sacré chèque).
Vers la fin des années 1990 et avec les premières cartes son bon marché, il devint possible de se servir d'un ordinateur pour créer de l'écho à pas cher. Je me souviens avoir utilisé la latence de l’ordinateur pour générer du delay en bouclant entrée et sortie d'une carte son.
C'est l'arrivé du logiciel synthedit au début des années 2000 qui m'a permis de créer mon premier programme de bouclage sous forme de plug-in VST.
Il était évident que la durée max de delay était liée à la quantité de mémoire disponible du PC et plus seulement à la somme disponible sur le compte en banque. J'ai donc listé les fonctions que je recherchais et que je ne trouvais pas dans le matériel « hard » et les logiciels de l'époque avec un critère principal, le prix (20€ pour une licence synthedit).
Il s'agissait de pouvoir reproduire des effets et principes de composition que j'avais entendu dans divers styles : la musique de phase (Reich, Glass), l'ambient (Eno, Fripp...), le dub.
Il me fallait donc a minima :
- deux chambres d’écho synchronisées de type magnéto à bande/Echoplex avec une durée max de 20 sec (au delà ça devient dur à gérer musicalement) ;
- la possibilité de filtrer le son entre chaque répétition pour simuler la perte d'aigus des systèmes à bandes réglable en valeur musicale (mesure et temps) et acceptant les mesures impaires ;
- pouvoir avoir un feedback positif (pour des écho allant vers la saturation comme en dub) ;
- pouvoir être désynchronisé (pour jouer « It's gonna rain ») ;
- permettant la lecture à l'envers et le ralentissement des boucles créées après échantillonnage à la volée (c'est le volet sampler de delsampler) ;
- tout changement devait pouvoir être fait en fondu enchaîné de façon automatique ;
- avec un métronome permettant la visualisation du tempo en silence.
Avec le temps j'ai ajouté d'autres fonctions : reverb interne, tap tempo, possibilité de changer la hauteur des boucles d'écho en temps réel, la télécommande des fonctions principales utilisant les périphériques de jeu (joystick...) ou le Midi.
J'ai ainsi pu réaliser mon propre pédalier de commande en utilisant un composant issu d'une borne d'arcade et quelques interrupteurs achetés aux puces.
J'ai plus ou moins arrêté le développement de ce programme en 2010, et même si beaucoup de programmes commerciaux, voire gratuits, existent dans ce domaine, cela reste mon programme de base pour le travail sur le bouclage et l'écho car il correspond à mes attentes et regroupe la plupart des fonctions que je recherche dans une seule interface. »
Daniel Palomo Vinuesa.
Compositeur et clarinettiste issu du conservatoire de Caen, compagnon de route de Valentin Clastrier, de Louis Sclavis et plus récemment de Dominique A, Michel Aumont insuffle à la musique traditionnelle bretonne un air nouveau à travers diverses formations exemplaires (BF15, grand orchestre armorigènE, Armorivielle Project, Indigène…). Après des débuts solo autour de l’Echoplex, il initie avec la complicité de Philippe Ollivier la création de Logelloop, soft qu’il utilise dorénavant avec toute la virtuosité qui lui est naturelle.
http://www.michelaumont.fr/
Projet solo du guitariste, producteur et chroniqueur lyonnais Jean-Louis Prades depuis 1997, Imagho intègre traitements électroniques et field recording pour générer une musique mélancolique à la croisée du jazz, du folk, du post-rock et de l’electronica. Imagho a signé cinq albums et initié de multiples projets parallèles d’obédience plus noise et improvisée (Baka !, Sketches of Pain, Frz-Imagho…). Depuis 2009, ses enregistrements sont distribués par l’excellent label Toulousain We Are Unique records et « Inside looking out » a été nominé aux Qwartz dans la catégorie « meilleur album ».
https://imagho.bandcamp.com/
Saxophoniste, compositeur intransigeant naviguant entre abstraction et esprit dada, jazz, rock et musique concrète, Daniel Palomo Vinuesa n’a eu de cesse d’expérimenter depuis les années 1980 les rapports entre acoustique et électronique au sein de divers collectifs (Serendipity, Panopticon) et dispositifs orchestraux. Son nouveau trio réunit Nelly Meunier (clarinette, voix, boucles) et Nabil Bouteldja (percussions).
http://vinuesa.perso.neuf.fr/
Formé au conservatoire de Toulouse, le violoncelliste Andreï Jourdane poursuit une double carrière de concertiste (Orchestre du Capitole, Ensemble Intemporel…) et d’enseignant. Passionné de composition et d’informatique musicale, c’est tout naturellement qu’il s’oriente vers les technologies du live looping. Le Paris Loop Jubilee sera en la matière son baptême du feu.
http://www.andreijourdane.eu/
Derrière le projet polymorphe In Mobile se dissimule Olivier Malhomme, multi-instrumentiste et compositeur prolifique d’une folle variété, esprit tout de rigueur et de fantaisie, un genre de Pessoa du rock progressif, fondateur de l’IRAM (Institut de restauration des Audiogrammes Martiens) et créateur de pièces guitaristiques d’une parfaite originalité.
https://soundcloud.com/in-mobile
Tout juste sortie, la dernière-née de la série Boss RC, la RC 505, est résolument dédiée aux beatboxers et aux vocalistes (mais contrôlable avec un pédalier midi). Elle permet la manipulation de cinq loopers indépendants et offre de nombreux effets et possibilités de programmation. Rodé à l’exercice, Tioneb en assurera la présentation.
Spécifications générales :
- 5 pistes stéréo disponibles simultanément avec commandes dédiées et faders de volume indépendants ;
- Large palette d’effets pour signaux d’entrée et enregistrés, dont des effets échantillonneur et de DJ ;
- Sélection indépendante du tempo et du mode de reproduction pour chaque piste ;
99 mémoires contenant chacune les 5 pistes, les réglages d’effets, de reproduction, etc. ;
- 85 motifs rythmiques, incluant des mesures complexes ;
- Pilotage à distance via MIDI et par commutateurs au pied ou pédale d’expression ;
- Prise USB pour l’échange de données audio avec un ordinateur et l’échange de données audio et MIDI avec un logiciel DAW ;
- Entrée micro XLR avec alimentation fantôme, entrées mono/stéréo pour instruments et entrée AUX stéréo.
Le site de Roland :
http://www.rolandconnect.com/product_2013-04.php?p=rc-505&l=fr-FR"http://www.rolandconnect.com/product_2013-04.php?p=rc-505&l=fr-FR
Vidéo :
http://www.youtube.com/watch?v=C0XZA2c-5h0
Guitariste, batteur et luthier bricolo né au mix dans le chaudron groovy de Radio Nova à la fin des années 1990, gravé pour l’éternité sur le label Blue Note (« Loop in release », 2001), Booster balade depuis toujours sa silhouette nonchalante entre le funk le plus débridé et l’expérimentation jazz tous azimuts. Installé à Lyon où il a intégré le Grolektif, il donne désormais libre cours à ses deux passions sous la forme d’un big band (Booster goes P-Funk) et, en solo ou avec ses invités, de l’Echoplex Project.
http://boosterized.com
On voit depuis quelque temps surnager dans le cyberspace un étrange invertébré dispensant toutes tentacules dehors une inquiétante pop Lo-fi du meilleur effet. Il s’agit d’un poulpe, mais pas de n’importe quelle espèce. Celui-ci, nourri de musique psychédélique et sérielle, d’indie et de krautrock, applique à la lettre une des « stratégies obliques » de Brian Eno et Peter Schmidt : « Examine avec attention les détails les plus embarrassants et amplifie-les ». Nous sommes particulièrement heureux de l’avoir pris dans notre épuisette.
http://lplpo.bandcamp.com/
Chercheur en informatique à l’université de Bordeaux, Florent Berthaut a consacré sa thèse à la notion de Live Looping hiérarchique et développé un logiciel immersif dédié à son application, Drile.
« Au cours du XXème siècle, les progrès de l’électronique puis de l’informatique ont permis la conception de nouveaux instruments de musique, ajoutant au contrôle de paramètres sonores tels que l’amplitude, la hauteur et le timbre, des possibilités de modification de paramètres musicaux de haut niveau sur des processus sonores. Le musicien électronique combine ainsi les rôles d’instrumentiste et de chef d’orchestre. Le contrôle d’instruments multi-processus, composés de plusieurs processus sonores s’exécutant simultanément, est grandement facilité par l’utilisation d’interfaces graphiques. Potentiellement, une infinité de processus représentés graphiquement peuvent être sélectionnés et manipulés.
Les interfaces graphiques 3D étendent ces possibilités. Elles offrent de nouveaux paramètres graphiques (formes 3D complexes, matériaux, éclairages, organisation spatiale) pour visualiser les paramètres sonores. Les nombreuses techniques d’inter- action 3D permettant de sélectionner, déplacer et modifier des objets virtuels peuvent être adaptées à des fins musicales. La navigation dans des environnements 3D peut être utilisée comme métaphore efficace pour le parcours de partitions ou de structures musicales. Dans un contexte de réalité virtuelle, il est de plus possible d’immerger le musicien, et le public, dans un environnement musical. Cette immersion, en plus de l’aspect évidemment spectaculaire, peut améliorer la perception et la compréhension de l’instrument virtuel. »
Vidéo : http://vimeo.com/9206485#
Site : http://hitmuri.net/index.php/Research/Drile
À lire :
Florent Berthaut : Construction, manipulation et visualisation de processus sonores dans des environnements virtuels immersifs pour la performance musicale, Thèse (2010)
http://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00573382
Florent Berthaut, Myriam Desainte-Catherine et Martin Hachet : DRILE: an immersive environment for hierarchical live-looping
http://www.hitmuri.net/uploads/Research/nime10.pdf
Agitateur de sons et d’idées, génial percussionniste, théoricien reconnu des rythmes extra-occidentaux, poly-instrumentiste total, professeur recherché, inventeur d’une multitude de dispositifs électroniques, concepteur du Looperlative LP2, Rick Walker fait figure de chef de bande du mouvement Live looping mondial dont il réunit chaque année les meilleurs représentants à l’occasion de son festival, le Y2KX+1, en Californie, incontestable Mecque des loopers. C’est un honneur de le recevoir à Paris.
http://www.looppool.info/
Depuis quelques années, les beatboxers se sont emparé avec énergie des techniques du live looping jusqu’à en devenir aujourd’hui la mouvance la plus visible. Au dubstep cru de ses collègues, Tioneb apporte une note délicieusement soul et toute l’étendue d’un savoir-faire forgé au contact du batteur Leon Parker et au sein du duo electro-jazz Human Player. En 2012, il décroche le titre de champion du monde au BOSS Loop Station World Championship de Francfort.
http://www.tioneb.org/
Le Meta-trombone (principalement développé autour des logiciels Mobius et Bidule) permet d’explorer activement diverses rétroactions impliquant l’analyse des inputs sonores et de position de l’instrumentiste (I-Phone), permettant en particulier le déclenchement de routines complexes de looping en fonction des notes produites par l’instrument.
Site : http://no-insects.blogspot.fr/search/label/meta-trombone
Album : http://sylvainpoitras.bandcamp.com/album/meta-trombone-vol-1
Figure distinguée de l’avant-garde américaine, Amy X Neuburg développe depuis 25 ans son travail de compositrice et de performeuse dans le domaine de la musique vocale et électronique. Pionnière du live looping, elle met dorénavant à profit sa tessiture de quatre octaves, son instinct théâtral inné et une ironie mordante pour créer un « avant-cabaret » qui doit autant à Meredith Monk qu’à la comédie musicale. D’elle, John Adams dit « qu’elle est la meilleure chose arrivée d’Oakland depuis Jack London ».
http://www.amyxneuburg.com/
Luca Formentini a toujours considéré la guitare moins comme un instrument que comme la source potentielle de sons dédiés à la transformation, au traitement analogique ou digital. Il utilise le live looping depuis 1992 dans cette optique, générant des clusters et des nappes d’une profonde et belle étrangeté. Luca a collaboré avec des musiciens de pays et de contextes très divers parmi lesquels Markus Stockhausen, Jean-François Zygel, Steve Lawson, Franck Vigroux, Theo Travis, Tellef Ogrim…
http://www.unguitar.com/
Guitariste, compositeur et concepteur de dispositifs numériques pour le spectacle vivant, Jean-François Domingues a poussé le patching dans Usine à son extrême limite afin d’élaborer une interface de live looping révolutionnaire, Noundo. En compagnie d’un autre transfuge de la communauté Usine, le batteur Thomas Sisqueille, le projet Midi Learn sera porté pour une immersion glitch sur les fonds baptismaux du Paris Loop Jubilee.
Emmanuel Reveneau explore la création numérique à la façon du pygmée sa forêt sans bords, traçant un chemin creux la tête pleine de grands mythes : la première et la seconde cybernétique, l’école de Canterbury, l’art total...
Partant du principe que le cerveau humain reste le calculateur le plus puissant, chaque performance solo éprouve à travers la pratique du live looping les relations équivoques du corps à la machine, et de l’esprit avec lui-même. Emmanuel Reveneau coordonne par ailleurs le Paris Loop Jubilee.
https://www.youtube.com/user/TheLucidbrain?feature=mhee
Conçu par Rick Walker et développé à San Jose (Californie) par Bob Amstadt de Looperlative, le LP2 Mini Looper réunit dans un format très économique un ensemble de fonctions familières des utilisateurs de l’Echoplex et du LP1, et trente niveaux d’Undo.
Spécifications générales :
Midi Sync (in/out)
Balanced and UnBalanced Inputs (for microphones with tip/ring/sleeve jacks)
30+ levels of Undo
Feedback with automatic Undo points at every 10% reduction of feedback
Record/Overdub
Play/Stop
Retrigger (One Shot)
Retrigger (Play Continuously)
Forward/Reverse
1/2 Speed/Double Speed
1/4 Speed/Quadruple Speed
Quantized Slice Replacement at these musical increments: 1/8, 1/16, for 4/4, 1/12, 1/24 for triplet 8ths and triplet 16ths
1/7, 1/9, 1/10 for odd time signatures
1/64 for glitching
Storage (and retrieval) of up to 8 loops on a 4 gig SD Card
Battery Operated (one 9v battery for 2 hours continuous play) or Wall Wart AC adapter
Ce projet réunit le percussionniste et chercheur en informatique musicale Florent Berthaut a.k.a Hitmuri et le graphiste Damien Arnaud a.k.a Tabaramounien. Le duo propose des improvisations sonores et visuelles créant une œuvre homogène où puissent librement dialoguer l’image et le son. Florent Berthaut présentera par ailleurs ses travaux autour du concept de « live looping hierarchique » et de l’instrument de musique virtuel immersif Drile.
http://thehobartphase.net/
Philosophe de formation, Sylvain Poitras explore la circularité et l’autoréférence dans le domaine de la vidéo, de la bande dessinée et de la musique électroacoustique : qu’il utilise des images, des mots ou des sons, il s’agit avant tout pour lui de brouiller les frontières entre la chose et sa désignation. Concepteur de logiciels et tromboniste, c’est tout naturellement qu’il invente le « meta-trombone », un système de traitement sophistiqué qui curieusement l’entraîne sur les terres du free-jazz des origines.
http://www.sylvainpoitras.com/
Conçu à l’intention des « One man band », Noundo (développé avec Usine de Sensomusic) est fondamentalement un logiciel multi-entrées organisé autour d’une matrice de routing permettant une gestion circulaire entre des entrées audio (4), les loopers (4+1 drop looper) et des effets (2 pistes de 4 FX/vst chacune). On peut boucler, appliquer des effets ou des textures, reboucler la boucle dans un autre looper, etc., et cela dans toutes les directions. Les possibilités de mix sont infinies.
Site : http://noundo.jimdo.com
Vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=37qr0x91xD4
Diva noisy, performeuse incandescente, exploratrice hors-normes des possibilités émotionnelles de la voix, collaboratrice au long cours des Residents, du pianiste et activiste tchèque Mirek Vodrážka, et de son regretté mentor, le pionnier de l’informatique musicale Max Mathews, la plus européenne des loopers américains multiplie avec gourmandise les expériences en Europe et aux États-Unis, armée de son Line 6 DL4 et d’une confiance à toute épreuve dans la beauté des êtres et du monde.
https://amatvoicesound.wordpress.com/
Élève de Robert Fripp, pivot de la communauté Live looping et préhistorien de la discipline, Michael Peters sculpte depuis la fin des années 1970 et ses premières expériences sur bandes magnétiques une matière sonore d’une richesse et d’une sensibilité laissant loin derrière la cohorte de guitaristes « ambient » qui représentaient encore jusqu’à très récemment la principale composante du mouvement. Compositeur prolifique désormais passé au tout numérique, Michael Peters exploite divers processus pour créer lors de ses improvisations des structures génératives d’une imperturbable beauté, sans jamais céder à la facilité.
http://www.michaelpeters.de/
En 1963, le Théâtre des Nations, festival parisien de théâtre international, invite la troupe du dramaturge américain Ken Dewey à présenter une performance au théâtre Récamier. Le festival se fait l'écho d'un nouveau mouvement qui a pris son essor à New-York et en Californie, le happening, initié en 1957 par Allan Kaprow, un élève de John Cage. L'American Conservatory Theatre (ACT) de Dewey est multidisciplinaire, on y trouve des membres du Living Theatre et de la troupe de la chorégraphe Anna Halprin. Tout ce petit monde expérimente en Californie de nouvelles formes de théâtre et de chorégraphie « multimedia » en association avec les membres du San Francisco Tape Music Center, un groupe de musiciens passionnés de création sonore à partir de manipulations de bandes magnétiques, dont Terry Riley qui a créé en 1962 « Mescalin Mix » pour un spectacle d’Halprin.
En 1963, Riley vivote à l'époque à Paris en jouant des standards de jazz dans les bars de Pigalle et sur les bases de l’OTAN. Il rencontre Dewey, lequel lui propose de créer la bande-son de la performance qu’il compte donner en adaptant sa pièce « The Gift », montée l’année précédente à San Francisco. Dewey loue un château en ruines dans la banlieue sud de Paris pour les répétitions, Riley lui propose de travailler avec Chet Baker – tout juste sorti de prison en Italie pour possession d’héroïne – et son quartet en tant que musiciens et comédiens. Le quartet comprend Luis Fuentes (trombone), Luigi Trussardi (contrebasse) et George Solano (batterie), et joue régulièrement au cabaret le Chat qui pêche, rive gauche.
Riley enregistre le quartet (ensemble, puis séparément) dans les studios de la Radio Télévision Française, installés au Théâtre Sarah Bernhardt (actuel Théâtre de la ville) pour les retransmissions des spectacles du Théâtre des Nations. Baker choisit d’interpréter « So what » de Miles Davis, une pièce modale parfaitement adaptée aux intentions de Riley qui enregistre par ailleurs des extraits du texte de « The Gift » récités par John Graham. Riley décrit à l’ingénieur-son de la RTF présent pour l’aider au mixage le principe d’écho utilisé lors de l’enregistrement de Mescalin Mix. Écoutons Riley : « J’ai décrit cet effet à l’ingénieur français, un homme très sérieux avec un manteau blanc, qui bricola un moment avant d’assembler deux magnétophones ensemble. Mon dieu ! Le son que j’ai entendu était exactement ce que je cherchais… Tout ce que vous avez à faire est de réunir deux magnétophones. Le premier joue, le second enregistre, la bande circule entre les deux têtes de lecture. Quand la première machine enregistre, elle envoie le signal à l’autre machine qui joue ce qui a été ajouté. Cela n’arrête jamais de s’accumuler… » Répétition et accumulation : le Time Lag Accumulator est né, modifie définitivement l’approche musicale de Riley et l’entraîne logiquement vers la composition l’année suivante de la pièce fondatrice de la musique minimaliste, In C. Riley utilisera par ailleurs un système équivalent durant toutes les années 60 au cours d’improvisations qui pouvaient durer toute la nuit, en s’accompagnant à l’harmonium et au saxophone.
Quand Chet Baker entend le résultat passé à la moulinette du Time Lag Accumulator, il s’écrie « Man, that’s some crazy shit ! » Il n’est pas le seul à réagir négativement à cette déstructuration en règle de sa musique. Les représentations de « The Gift », les 8, 9 et 10 juillet 1963, provoquent l’incompréhension, voire la colère du public parisien venu essentiellement pour entendre le trompettiste et s’attendant à un genre de comédie musicale. Baker n’est même pas présent à la première et Riley le remplace au pied levé en utilisant un débouche-lavabo en guise de trompette. Comédiens, danseurs et musiciens sont installés sur un immense mobile en métal pendu au plafond, œuvre du sculpteur Jerry Walters, dans un équilibre précaire. L’argument de la pièce, un objet circulant de main en main, s’improvise à chaque représentation et permet toutes sortes de provocations obligeant les musiciens à jouer plus fort pour couvrir les cris de la foule. Au jazz du quartet répond le maelstrom sonore de la musique de Riley. Le dernier soir, un acteur conclut sa réplique « This is an incredible experience » en détruisant magnétophones et bandes dont il ne restera au final que des fragments, les 23 minutes d’enregistrement connues depuis lors sous le nom de « Music for the Gift ».
In 1963, the Theatre des Nations, a Parisian international theater festival, invited American playwright Ken Dewey’s company to present a performance at the Recamier Theater. The festival gave voice to the happening, a new movement initiated in 1957 by a student of John Cage named Allan Kaprow and that took off in New York and California. Dewey’s American Conservatory Theater (ACT) is multidisciplinary and includes choreographer Anna Halprin’s dancers in addition to members of the Living Theatre. In California, they experimented with new forms of theater and dance to create "multimedia" production in association with members of the San Francisco Tape Music Center. The Tape Music Center was a group of musicians that were interested in creating music by using magnetic tapes recorders. This group included Terry Riley, who created “Mescalin Mix" in 1962 for one of Halprin’s shows.
In 1963, Riley scraped together a living in Paris playing jazz standards in bars in Pigalleand on NATO bases. Upon meeting Dewey, he agreed to create the soundtrack for the playwright’s intended performance at the festival: an adaptation of his play "The Gift" created the previous year in San Francisco. Dewey rented a ruined castle in the southern suburbs of Paris for rehearsals, while Riley made plans to work with Chet Baker - just released from prison in Italy for possession of heroin - and his quartet as musicians and actors. At the time, the quartet played regularly on the left bank at the cabaret le Chat qui pêche and included Luis Fuentes (trombone), Luigi Trussardi (bass) and George Solano (drums).
Riley recorded the quartet (together, then separately) in the studios of the Radio Télévision Française, installed in the Sarah Bernhardt Theatre (current Théâtre de la ville) to broadcast the plays presented during the Théâtre des Nations. Baker chose to interpret "So What" by Miles Davis, a modal piece perfectly adapted to Riley’s intentions. Riley also recorded excerpts from the text of "The Gift" read by John Graham. Riley described to the RTF sound engineer assigned to assist him the echo technique he used to record “Mescalin Mix”. In Riley’s words: “I described the effect to the french engineer, a very straight guy in a white coat, wo fooled around and ended up hooking two tapes recorder together. Boy ! When you heard that sound it was just what I wanted… What you do is connect two tapes recorders. The first is playing back, the second recording, the tape streched across the heads of both. As this machine records, it feeds back to the other machine, which plays back what it’s added. It keeps building up… »
Repetition and accumulation: the Time Lag Accumulator was born and would permanently alter Riley’s musical approach. He followed this development to its logical conclusion the following year by composing the founding piece of minimalist music: “In C”. Riley would also use a similar system in the 60’s for all-night improvisations in which he accompanied himself on the harmonium and saxophone.
When Chet Baker heard his quartet’s music passed through the mill of the Time Lag Accumulator, he exclaimed "Man, that's some crazy shit!" Many shared his negative reaction to this deconstruction of the rule of music. The performances of "The Gift" on July 8, 9 and 10 1963 caused misunderstanding and even anger among a Parisian public that had come mainly to hear the famous trumpeter and expected a kind of musical theater. Baker was not even present at the premiere and Riley had to fill-in for him on short notice, using a toilet plunger as a trumpet. Actors, dancers and musicians were precariously balanced on a huge metal mobile hanging from the ceiling created by sculptor Jerry Walters. The title object would move from hand to hand during the play and was improvised at each performance. This created all kinds of opportunities for provocation and forced the musicians to play ever louder to cover the screams of the crowd. The maelstrom of sound created by Riley met the jazz quartet’s music. On the last evening, an actor concludes his line "This is an incredible experience" by destroying recorders and tape of which only fragmentswould ultimately survive: the 23 minutes of recording known since as the "Music for the Gift".